L’une des missions clés du télescope spatial James Webb de la NASA/ESA/CSA est d’explorer l’univers primitif. Maintenant, la résolution et la sensibilité inégalées de l’instrument NIRCam de Webb ont révélé, pour la première fois, ce qui se trouve dans l’environnement local des galaxies dans l’univers très primitif. Cela a résolu l’un des mystères les plus déconcertants de l’astronomie : pourquoi les astronomes détectent-ils de la lumière provenant d’atomes d’hydrogène qui aurait dû être entièrement bloquée par le gaz pur formé après le Big Bang ? Ces nouvelles observations de Webb ont identifié de petits objets faibles entourant les galaxies mêmes qui montrent l’émission d’hydrogène ‘inexplicable’. En conjonction avec des simulations de pointe des galaxies dans l’univers primitif, les observations ont montré que la fusion chaotique de ces galaxies voisines est la source de cette émission d’hydrogène.
La lumière se déplace à une vitesse finie (300 000 kilomètres par seconde), ce qui signifie que plus une galaxie est éloignée, plus il a fallu de temps à sa lumière pour atteindre notre système solaire. Par conséquent, non seulement les observations des galaxies les plus lointaines explorent les confins de l’univers, mais elles nous permettent également d’étudier l’univers tel qu’il était dans le passé. Pour étudier l’univers très primitif, les astronomes ont besoin de télescopes exceptionnellement puissants capables d’observer des galaxies très éloignées, et donc très faibles. L’une des capacités clés de Webb est sa capacité à observer ces galaxies très éloignées, et ainsi à sonder l’histoire précoce de l’univers. Une équipe internationale d’astronomes a mis à profit de manière exceptionnelle la capacité étonnante de Webb pour résoudre un mystère de longue date en astronomie.
Les galaxies les plus anciennes étaient des sites de formation d’étoiles vigoureuse et active, et étaient donc des sources riches en une lumière émise par des atomes d’hydrogène appelée émission Lyman-α. Cependant, pendant l’époque de la réionisation, une immense quantité de gaz d’hydrogène neutre entourait ces zones de formation d’étoiles actives (également appelées nurseries stellaires). De plus, l’espace entre les galaxies était rempli de plus de ce gaz neutre qu’aujourd’hui. Ce gaz peut absorber et diffuser très efficacement ce type d’émission d’hydrogène, de sorte que les astronomes ont depuis longtemps prédit que l’émission Lyman-α abondante libérée dans l’univers très primitif ne devrait pas être observable aujourd’hui. Cependant, cette théorie n’a pas toujours résisté à l’examen, car des exemples d’émission d’hydrogène très précoce ont déjà été observés par les astronomes. Cela a présenté un mystère : comment se fait-il que cette émission d’hydrogène, qui aurait dû depuis longtemps être absorbée ou diffusée, soit observée ? Le chercheur de l’Université de Cambridge et investigateur principal de la nouvelle étude, Callum Witten, explique :
“Une des questions les plus déconcertantes que posaient les observations précédentes était la détection de lumière provenant d’atomes d’hydrogène dans l’univers très primitif, qui aurait dû être entièrement bloquée par le gaz neutre pur formé après le Big Bang. De nombreuses hypothèses ont été avancées précédemment pour expliquer la grande échappée de cette émission ‘inexplicable’.”
La percée de l’équipe est due à l’extraordinaire combinaison de résolution angulaire et de sensibilité de Webb. Les observations avec l’instrument NIRCam de Webb ont permis de résoudre de plus petites galaxies plus faibles qui entourent les galaxies lumineuses à partir desquelles l’émission d’hydrogène ‘inexplicable’ avait été détectée. En d’autres termes, l’environnement de ces galaxies semble être un endroit beaucoup plus fréquenté que nous ne le pensions auparavant, rempli de petites galaxies faibles. De manière cruciale, ces galaxies plus petites interagissaient et fusionnaient les unes avec les autres, et Webb a révélé que les fusions de galaxies jouent un rôle important dans l’explication de l’émission d’hydrogène mystérieuse des premières galaxies. Nicolas Laporte, membre de l’équipe de l’Université Aix-Marseille, ajoute :
“Là où Hubble ne voyait qu’une grande galaxie, Webb voit un amas de petites galaxies interagissant, et cette révélation a eu un impact énorme sur notre compréhension de l’émission d’hydrogène inattendue de certaines des premières galaxies.”
L’équipe a ensuite utilisé des simulations informatiques de pointe pour explorer les processus physiques qui pourraient expliquer leurs résultats. Ils ont découvert que l’accumulation rapide de masse stellaire par le biais des fusions de galaxies provoquait à la fois une forte émission d’hydrogène et facilitait l’évasion de cette radiation par des canaux dégagés du gaz neutre abondant. Ainsi, le taux élevé de fusion des galaxies plus petites précédemment non observées présentait une solution convaincante au mystère de longue date de l’émission d’hydrogène précoce ‘inexplicable’.
L’équipe prévoit des observations de suivi avec des galaxies à divers stades de fusion, afin de continuer à développer leur compréhension de la manière dont l’émission d’hydrogène est éjectée de ces systèmes en évolution. En fin de compte, cela leur permettra d’améliorer notre compréhension de l’évolution des galaxies.
Ces découvertes ont été publiées aujourd’hui dans Nature Astronomy.