
Une équipe de recherche internationale dirigée par Jin Koda, professeur à Stony Brook, et comprenant Samuel Boissier du LAM dévoilent le cœur des nuages moléculaires à la périphérie de la galaxie M83
Le mystère de la formation des étoiles dans les galaxies continue d’intriguer les astronomes du monde entier. Pourtant, une question clé demeure : comment, pourquoi et où les étoiles se forment-elles dans l’Univers ? Une nouvelle découverte d’une équipe internationale d’astronomes fournit un indice important sur la formation des étoiles.
L’équipe de chercheurs a utilisé le grand réseau millimétrique/submillimétrique d’Atacama (ALMA) pour étudier les parties externes de la galaxie spirale M83, à une distance de 15 millions d’années-lumière de la Terre. Ils ont découvert 23 concentrations d’un gaz moléculaire dense appelé « nuages moléculaires », qui témoignent de la région de naissance des étoiles.
Les nuages moléculaires sont un site typique de formation d’étoiles dans les parties internes des galaxies. En ce qui concerne les parties externes de nombreuses galaxies, les scientifiques n’avaient pas encore compris comment et pourquoi les étoiles se formaient, car ils ne pouvaient pas localiser leur site de formation. Pourtant, on sait qu’un nombre surprenant de très jeunes étoiles se trouvent aux confins de nombreuses galaxies. Ces 23 nuages moléculaires semblent différents de leurs homologues dans les parties habituelles de formation d’étoiles dans les galaxies. En effet, la plus grande partie de ces nuages n’étaient pas visibles comme c’est le cas pour les nuages moléculaires « normaux »; seuls leurs noyaux denses de formation d’étoiles, les « cœurs » des nuages, ont été observés. Ce nouveau résultat de recherche ouvre la voie à une meilleure compréhension de la formation d’étoiles dans les galaxies.
En outre, la découverte de ces nuages moléculaires a permis d’établir un lien essentiel avec le grand réservoir de gaz atomique diffus au sein des nuages. Normalement, le gaz atomique se condense en nuages moléculaires denses, où des noyaux encore plus denses se développent et forment des étoiles. Ce processus de conversion du gaz atomique en gaz moléculaire se produit même à la périphérie des galaxies, mais il s’est avéré être très inefficace.
Koda et ses collègues ont présenté leurs conclusions lors de la 243e réunion de la Société américaine d’astronomie (AAS), qui s’est tenue à la Nouvelle-Orléans le 8 janvier. La présentation de l’AAS comprenait une confirmation de l’hypothèse présentée dans un article de 2022, intitulé « First Detection of the Molecular Cloud Population in the Extended Ultraviolet Disk of M83 », publié dans The Astrophysical Journal , ainsi que de nouveaux résultats obtenus grâce au Very Large Array (VLA) de Jansky et au Green Bank Telescope (GBT).
Samuel Boissier a contribué à la découverte, il y a 18 ans, par le satellite GALEX de la NASA, de la formation d’étoiles à la périphérie des galaxies dites XUV, telles que M83. « Ce type de formation d’étoiles à la périphérie des galaxies est un mystère persistant depuis leur découverte », explique Koda, « Les astronomes sont impatients de comprendre comment les étoiles se forment, et notre découverte fournit un indice sur les processus de formation d’étoiles ». Koda et ses coauteurs écrivent que « ces nuages moléculaires sont probablement les principaux moteurs de l’activité de formation d’étoiles dans les parties périphériques des galaxies ». Ils expliquent en outre : « Nous avons émis l’hypothèse que ces nuages partagent, en moyenne, la même structure commune (distribution de masse) que les nuages moléculaires de la Voie lactée, tels qu’Orion, et ont des noyaux denses de formation d’étoiles noyés dans d’épaisses couches qui comprennent la plus grande partie du gaz moléculaire . Cependant, leurs enveloppes sont invisibles ».
La révélation de ces nuages moléculaires a permis d’établir un lien avec un vaste réservoir de gaz atomique diffus, une autre découverte de cette recherche. Normalement, le gaz atomique se condense en nuages moléculaires denses, à l’intérieur desquels des noyaux encore plus denses se développent et forment des étoiles. Ce processus est à l’œuvre même à la périphérie des galaxies, mais la conversion de ce gaz atomique en nuages moléculaires n’était pas évidente, pour des raisons qui ne sont pas encore résolues.
Koda et ses collègues sont parvenus à cette conclusion en utilisant des données recueillies à l’aide de plusieurs instruments, notamment le grand réseau millimétrique/submillimétrique d’Atacama (ALMA), le très grand réseau Karl G. Jansky (VLA) et le télescope Green Bank (GBT), ainsi qu’avec le télescope Subaru de l’observatoire astronomique national du Japon (NAOJ) et le Galaxy Evolution Explorer (GALEX) de la NASA.
Amanda Lee, qui était étudiante de premier cycle dans l’équipe de recherche de Koda à l’université de Stony Brook, a traité les données du GBT et du VLA pour ces résultats. Elle a ainsi découvert le réservoir de gaz atomique à la périphérie de la galaxie. « Nous ne comprenons toujours pas pourquoi ce gaz atomique ne se transforme pas efficacement en nuages moléculaires denses et ne forme pas d’étoiles », ajoute Lee, qui poursuit actuellement son doctorat en astronomie à l’UMass Amherst. « Comme c’est souvent le cas en astronomie, la recherche de réponses à un mystère peut souvent conduire à un autre mystère. C’est pourquoi la recherche en astronomie est passionnante ».
Les recherches qui ont abouti aux résultats de l’équipe ont été financées en partie par la subvention AST-20006600 de la National Science Foundation et par la subvention NNX14AF74G de la NASA.
Contact au LAM: Samuel Boissier at lam.fr